Singes

Les fresques de street art sont d’authentiques bestiaires. Nombre d’animaux y sont représentés pour des raisons fort différentes.

Certaines peintures urbaines par leur souci de réalisme s’apparentent peu ou prou à la peinture animalière. Il s’agit pour l’artiste de proposer aux regardeurs des portraits « ressemblants » des animaux. Ce sont le plus souvent des copies de photographies et les finalités entre photographie et peinture sont de même nature.

La représentation des animaux dans le street art est étroitement liée à leur représentation dans notre culture. Certaines représentations ont un rôle essentiellement décoratif. D’autres sont bien davantage associées à la symbolique de l’animal.

À titre d’exemple, il est intéressant d’analyser quels rôles jouent la représentation des oiseaux dans les compositions et quels rôles sont attribués aux félins et aux serpents. Somme toute, une fonction de séduction esthétique balancée par le désir de l’artiste de susciter l’intérêt du regardeur en illustrant le caractère redoutable de l’animal.

Il en est tout autrement avec la représentation des singes et c’est précisément l’objectif de ma chronique.

Les artistes, soit mettent en avant la beauté des singes, soit ils valorisent, souvent à l’excès, le danger qu’ils représentent pour l’Homme.

Dans ce cas de figure, l’artiste oppose la faiblesse de l’Homme (la plus souvent de la femme !) à la force de l’animal. Une variation du thème de la Belle et la Bête. Une resucée de la très fameuse scène finale de King Kong (la version de 1933 de Merian C.Cooper et Ernest B. Schoedsack.)

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Souvent, les singes sont des substituts des humains. Ils sont peints alors dans des situations familières de la vie quotidienne des hommes et des femmes. Ils sont parfois habillés comme vous et moi et, comme d’autres, fument des « cigarettes qui font rire », boivent de l’alcool, s’affranchissent de tous les interdits sociaux. Bref, avec plaisir voire délectation, ils enfreignent les codes, tous les codes.

Ce qui me semble le plus significatif, est le fait de représenter les singes une bombe aérosol à la main en train de peindre une fresque. Dans ce cas de figure, fréquent en Occident, le singe est une figure archétypale du street artiste.

Bien sûr, ces fresques ne doivent pas, à mon sens, être interprétées au premier degré. Tout ceci est un jeu entre l’artiste et son œuvre, un jeu entre son œuvre et ceux qui la regardent. Un zest de provocation pour rire !

L’objectif étant de provoquer le rire, l’artiste n’est guère tenu de respecter des contraintes de fidélité dans la représentation. Une figure schématique suffit, voire une caricature. L’important est la lisibilité de la situation et le parallèle qu’établit le regardeur entre le singe et l’homme.

En conclusion, le singe dans le street art, a deux statuts. Le premier est sa condition animale, le second est un avatar de l’Homme. A vrai dire, cela n’est pas spécifique au street art et cela ne date pas d’hier ! Les street artistes, peut-être sans le savoir, s’inscrivent leurs œuvres dans un thème traditionnel de la peinture occidentale.