La paix, deux symboles

Les échos du monde qui nous parviennent sont des bruits de bottes. Guerre d’Israël contre le Hamas, guerre par procuration d’Israël contre l’Iran, guerre de la Russie contre l’Ukraine, guerre en République démocratique du Congo, guerre en Somalie.
Les street artistes et les réseaux sociaux sont des caisses de résonance de ces conflits armés. Les artistes comme les peuples veulent la paix. Leurs œuvres, avec force, expriment le rejet de la barbarie de la guerre et prônent la concorde et la fraternité.

Cette revendication de paix prend des formes différentes selon les artistes. La forme la plus simple et la plus aisément compréhensible est l’écriture. L’œuvre (mais un écrit tagué sur un mur est-il une œuvre ?), l’œuvre se réduit à l’écriture en toutes lettres de la revendication. Le plus souvent, l’écriture légende une œuvre peinte. Les œuvres mêlant lettrage et représentation sont nombreuses. Sur le même modèle, des œuvres mêlent représentation et symboles de la paix.

Il n’est pas, me semble-t-il, inutile de focaliser notre attention sur deux symboles de la paix : la colombe et le signe ☮.
Deux symboles parmi d’autres : la flamme, le rameau d’olivier, la grue en origami et le calumet. Il est vrai que ces derniers n’ont pas connu le même succès et ont été quasiment oubliés.
Venons-en au symbole le plus connu : la colombe de la paix.
Le symbole est d’origine biblique. Il renvoie à l’histoire de l’arche de Noé. Après avoir surmontés les épreuves du déluge, Noé et ses compagnons d’infortune, virent une colombe se poser sur le pont de l’arche. Noé se saisit de l’oiseau et le lança vers le ciel par trois fois. La colombe rapporta un rameau d’olivier, signe que la terre était débarrassée des eaux.
Dans l’iconographie chrétienne, la colombe symbolise l’Esprit Saint. Elle est souvent représentée planant au-dessus de Jésus lors de son baptême. Elle incarne alors la paix intérieure, la pureté et la présence divine.
Avant le christianisme, la colombe était un symbole de douceur et d’amour.
Les Grecs de l’antiquité consacraient la colombe à Aphrodite, déesse de l’amour. Les Romains à Vénus.
Le symbole est popularisé à l’époque moderne par Picasso.
En février 1949, un Congrès mondial des partisans de la paix a été organisé à Paris à la salle Pleyel. Aragon, l’un des organisateurs s’est adressé à Picasso pour lui demander un dessin pour l’affiche du congrès. Picasso s’inspirant des pigeons blancs qu’il garde en cage dans son atelier dessine une colombe tenant un rameau d’olivier.
Le symbole est repris en 1975 pour être l’emblème de l’année des femmes des Nations unies. Par la suite, il sera de nouveau repris par de nombreuses organisations onusiennes comme lors de la convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes, par la Force intérimaire des Nations unies au Liban et par l’ONU Femmes.
De nos jours, la colombe tenant dans on bec un rameau d’olivier symbolise la paix.

Cette brève histoire montre à l’évidence que la colombe a eu selon les époques et les contextes des significations différentes. Différentes mais voisines.
Le second symbole dont j’ai choisi de vous parler a une autre histoire.
Il a été créé le 21 février 1958 par Gerard Holtom à la demande de Bertrand Russell pour illustrer la campagne pour le désarmement nucléaire britannique. Holtom s’est basé sur le code sémaphore britannique pour créer cet emblème, les deux branches qui pointent à gauche et à droite signifient « N » et la barre centrale « D », pour Nuclear Disarmament.

Il a été l’emblème des opposants aux armes nucléaires dans le monde. Aujourd’hui, il est l’emblème de la paix, de la non-violence et du pacifisme. C’est à mon sens davantage un emblème qu’un symbole.
Les symboles et les emblèmes ont une histoire. Comme les couches sédimentaires, les significations successives se stratifient sans se fondre. Les comprendre c’est saisir le chemin souvent tortueux des significations à travers le temps long.